Article XII

                                                  Santé et bien-être

 

          1.       Les populations autochtones ont droit à ce que soient légalement reconnus la pratique de leur médecine traditionnelle, leurs traitements, leur pharmacologie, leurs soins, et leurs méthodes de promotion de la santé, de prévention et de rééducation. 

 

          2.       Les populations autochtones ont droit à la protection des plantes médicinales, des animaux et minéraux, essentiels à leur vie dans leurs territoires traditionnels.

 

          3.       Les populations autochtones ont le droit d’utiliser, de conserver, de développer et d’administrer leurs propres services de santé et d’avoir accès, sans aucune discrimination, à toutes les institutions et à tous les services de santé et de soins médicaux accessibles à l'ensemble de la population.

 

          4.       Les Etats fournissent les moyens nécessaires pour que les populations autochtones puissent éliminer de leurs communautés les conditions sanitaires inférieures aux normes acceptées par l'ensemble de la population.

 

 

                                                       Article XIII

                                  Droit à la protection de l’environnement

 

          1.       Les populations autochtones ont droit à un environnement sûr et sain, condition essentielle pour jouir du droit à la vie et du bien-être collectif.

 

          2.       Les populations autochtones ont le droit d'être informées des mesures susceptibles d'avoir un impact sur leur environnement, notamment lorsqu'il s'agit d'informations visant à assurer leur participation effective aux actions et décisions ayant des répercussions sur cet environnement.

 

          3.       Les populations autochtones ont le droit de conserver, réhabiliter et protéger leur environnement, ainsi que la capacité de production de leurs terres, territoires et ressources.

 

          4.       Les populations autochtones ont le droit de participer pleinement à la formulation, à la planification, à l'aménagement et à l’application de programmes gouvernementaux de conservation de leurs terres, territoires et ressources.

 

          5.       Les populations autochtones ont le droit de recevoir une aide de leurs Etats afin de protéger l’environnement, et elles peuvent demander une assistance aux organisations internationales.

 

          6.       Les Etats interdisent, sanctionnent et empêchent, de concert avec les autorités autochtones, l'introduction, l'abandon ou le dépôt de matières et résidus radioactifs, de substances et résidus toxiques, en contravention des dispositions légales en vigueur; de même que la production, l'introduction, le transit, la possession ou l'utilisation d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires dans les zones indigènes.

 

          7.       Lorsque l'Etat déclare qu'un territoire indigène est zone protégée, lorsque des terres et territoires font l'objet, ou peuvent faire l'objet, d'une demande de restitution de la part des populations autochtones, ou lorsqu'il s'agit de terres servant de réserves à la vie sauvage, les aires de conservation ne doivent pas être soumises à un quelconque développement des ressources naturelles sans le consentement informé et la participation des populations intéressées.

 

 

                                               QUATRIEME SECTION

                          DROITS D’ORGANISATION ET DROITS POLITIQUES

 

                                                       Article XIV

              Droit d’association, de réunion, de liberté d’expression et de pensée

 

          1.       Les populations autochtones ont le droit d'association, de réunion et d'expression, conformément à leurs usages, coutumes, traditions ancestrales, croyances et religions.

 

          2.       Les populations autochtones ont le droit de se réunir et d'utiliser à cet effet leurs lieux sacrés et de cérémonies; elles ont aussi le droit de maintenir un contact étroit et des activités communes avec ceux de leurs membres qui habitent les territoires des Etats voisins.

 

 

                                                       Article XV

                                                 Droit à l’autonomie

 

          1.       Les populations autochtones ont le droit de déterminer librement leur situation politique et de promouvoir librement leur développement économique, social, spirituel et culturel et par conséquent, elles ont  droit à l’autonomie, ou gouvernement indépendant, en ce qui concerne, notamment, la culture, la religion, l’éducation, l’information, les moyens de communication, la santé, le logement, l’emploi, le bien-être social, les activités économiques, l’administration des terres et des ressources, l’environnement et l’admission de non membres; elles ont aussi le droit de déterminer les ressources et les moyens de financement de ces fonctions autonomes.

 

          2.       Les populations autochtones ont le droit, si elles en décident ainsi, de participer sans discrimination, à tous les échelons, aux prises de décisions concernant des questions susceptibles d’affecter leur droits, leur existence et leur destin.  Elles peuvent intervenir directement ou par l’intermédiaire de représentants qu'elles auront élus conformément à leurs propres procédures.  Elles ont également le droit de conserver et de développer leurs propres institutions indigènes de décision, et d'accéder en toute égalité à toutes les institutions et instances nationales.


                                                       Article XVI

                                                    Droit indigène

 

          1.       Le droit indigène doit être reconnu comme faisant partie intégrante du régime juridique des Etats et de leur cadre de développement social et économique.

 

          2.       Les populations autochtones ont le droit de conserver et de renforcer leurs systèmes juridiques et de les appliquer dans les affaires internes de leurs communautés, y compris dans les cas impliquant la solution de conflits, la prévention des crimes et le maintien de la paix et de l'harmonie.

          3.       Dans la juridiction de chaque Etat, les affaires concernant les autochtones ou leurs intérêts sont conduites de manière à donner le droit aux autochtones d'être pleinement représentés, dans la dignité et l’égalité devant la loi.  Cela inclut l’application du droit et des coutumes indigènes et, le cas échéant, l’emploi des langues autochtones. 

 

 

                                                      Article XVII

        Incorporation nationale des systèmes juridiques et organisationnels indigènes

 

          1.       Les Etats facilitent l’inclusion, dans leurs structures organisationnelles, des institutions et pratiques traditionnelles des populations autochtones, en consultation avec ces populations et avec leur assentiment.

 

          2.       Les institutions de chaque Etat desservant les populations autochtones sont conçues en consultation avec les populations intéressées, et avec leur participation, pour renforcer et promouvoir l’identité, la culture, les traditions, l’organisation et les valeurs de ces populations. 

 

 

CINQUIEME SECTION

            DROITS SOCIAUX, DROITS ECONOMIQUES ET DROITS DE PROPRIETE

 

                                                      Article XVIII

    Modes traditionnels de propriété et survie culturelle.  Droit aux terres et territoires

 

          1.       Les populations autochtones ont droit à la reconnaissance légale des modalités et formes diverses et particulières de contrôle, de propriété et de jouissance des biens et territoires.

 

          2.       Les populations autochtones ont droit à la reconnaissance de leurs biens, et de leurs droits de propriété en ce qui concerne  les terres, territoires et ressources qu’elles ont occupés historiquement, ainsi qu'à l’usage des terres, territoires et ressources auxquels elles ont eu historiquement accès pour mener à bien leurs activités traditionnelles et de subsistance.


          3.       i.        Sous réserve des dispositions de l'alinéa 3.ii), lorsque les droits de propriété et d'usage des populations autochtones découlent de droits antérieurs à l'existence des Etats, ces derniers doivent reconnaître ces titres comme étant permanents, exclusifs, inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.

 

                   ii.       Ces titres ne peuvent être modifiés que d'un commun accord entre l’Etat et la population autochtone intéressée, lorsque la nature et les particularités de ladite propriété sont parfaitement connues et comprises.

 

                   iii.      Aucun élément de l'alinéa 3.i) ne doit être interprété comme limitant le droit des populations autochtones à la titularité au sein de la communauté, conformément à leurs coutumes et traditions, usages et pratiques traditionnels, ou comme ayant une incidence sur l'un quelconque des droits communautaires collectifs les concernant. 

 

          4.       Les populations autochtones ont droit à un cadre juridique réel qui protégera leurs droits sur les ressources naturelles de leurs terres (y compris leur capacité à utiliser, gérer et conserver lesdites ressources), sur l'utilisation traditionnelle de leurs terres, leurs intérêts dans les terres et les ressources, et leurs droits de subsistance.

 

          5.       Si l’Etat est propriétaire des minerais ou des ressources du sous-sol, ou s'il a des droits sur d’autres ressources existant sur les terres, les gouvernements doivent mettre en place, ou conserver, des procédures pour que les populations intéressées participent au processus visant à déterminer si elles ne seront pas lésées, et jusqu'à quel point, avant d'entreprendre ou d'autoriser un quelconque programme de prospection, de planification ou d’exploitation des ressources existant sur ces terres.  Les populations intéressées doivent participer aux bénéfices générés par de telles activités, et percevoir des indemnités qui ne sont pas inférieures aux normes du droit international pour tout dommage qu'elles peuvent subir à la suite de ces activités.

 

          6.       A moins que des circonstances exceptionnelles d'intérêt public ne le justifient, les Etats ne peuvent transporter ou déplacer les populations autochtones sans le consentement libre, véritable, public et informé desdites populations, et, dans tous les cas, après les avoir préalablement indemnisées et avoir remplacé immédiatement leurs terres par des terres satisfaisantes, de qualité égale ou supérieure et de statut juridique identique; et en leur garantissant le droit de retour si les causes ayant provoqué leur déplacement cessent d'exister.

 

          7.       Les populations autochtones ont droit à ce qu’on leur restitue les terres, territoires et ressources dont elles ont été traditionnellement les propriétaires, qu’elles ont occupés ou utilisés et qui ont été confisqués, occupés, utilisés ou endommagés; ou, si cette restitution n'est pas possible, elles ont droit à une indemnisation qui n'est pas inférieure aux normes du droit international.

 

          8.       Les Etats prennent des mesures de tout genre, y compris le recours aux mécanismes d'application de la loi, pour éviter, empêcher et punir le cas échéant toute intrusion ou utilisation desdites terres par des personnes étrangères non autorisées à s'arroger la possession ou l'usage de ces terres.  Les Etats accordent la plus haute priorité à la délimitation et à la reconnaissance des propriétés et zones utilisées par les populations autochtones.

 

                                                       Article XIX

                                                    Droit du travail

 

          1.       Les populations autochtones ont le droit de jouir pleinement des droits et garanties reconnus par les législations internationale ou nationales en matière de travail, et de bénéficier de mesures spéciales pour corriger, réparer et empêcher la discrimination dont elles auraient été l’objet dans le passé.

 

          2.       Si ces populations ne sont pas efficacement protégées par la législation applicable aux travailleurs en général, les Etats prennent les mesures spéciales qui peuvent être nécessaires pour:

 

          a.       Protéger effectivement les travailleurs et employés membres des communautés autochtones pour qu'ils obtiennent des contrats et conditions de travail justes et équitables;

 

          b.       Améliorer le service d’inspection du travail et l'application des normes dans les régions, entreprises ou activités salariées auxquelles prennent part des travailleurs ou employés autochtones;

 

          c.       Assurer que les travailleurs autochtones:

 

                   i.        Bénéficient de l’égalité des chances et de traitement en ce qui concerne toutes les conditions d’emploi, la promotion et l’avancement, et les autres conditions stipulées dans le droit international;

 

                   ii.       Jouissent du droit d'association, du droit de se consacrer librement aux activités syndicales à des fins licites, et du droit de conclure des conventions collectives avec les employeurs ou organisations de travailleurs;

 

                   iii.      Ne sont pas soumis à un harcèlement racial, sexuel ou de tout autre genre;

 

                   iv.      Ne sont pas soumis à des régimes de recrutement coercitifs, y compris la servitude pour dettes ou toute autre forme de servitude, qu’elle découle de la loi, de la coutume ou de dispositions individuelles ou collectives, qui seraient entachées de nullité absolue dans tous les cas;

 

                   v.       Ne sont pas soumis à des conditions de travail dangereuses pour leur santé et leur sécurité personnelle;

 

                   vi.      Reçoivent une protection spéciale quand ils offrent leurs services comme travailleurs saisonniers, occasionnels ou migrants, ou quand ils sont recrutés par des entrepreneurs de main d’oeuvre, de manière à bénéficier des avantages de la législation et des pratiques nationales qui doivent être conformes aux normes internationales des droits de l’homme établies pour cette catégorie de travailleurs ;

         

                   vii.     et que, comme leurs employeurs, ils sont pleinement informés  des droits des travailleurs autochtones, conformément à la législation nationale et aux normes internationales, et des recours et actions qu'ils peuvent intenter pour protéger ces droits.

 

 

                                                       Article XX

                                        Droits de propriété intellectuelle

 

          1.       Les populations autochtones ont droit à la reconnaissance, à la pleine propriété, au contrôle et à la protection de leur patrimoine culturel, artistique, spirituel, technologique et scientifique, et à la protection juridique de leur propriété intellectuelle grâce à des patentes, marques commerciales, droits d'auteur et autres procédures fixées par la législation nationale, ainsi qu'à des mesures spéciales visant à leur assurer un statut juridique et les moyens institutionnels pour développer cette propriété, l'utiliser, la partager, la commercialiser et la léguer aux générations futures.

 

          2.       Les populations autochtones ont le droit de contrôler et de développer leurs sciences et leurs technologies, y compris leurs ressources humaines et génétiques en général, les semences, les substances médicamenteuses, les connaissances de la faune et de la flore, les conceptions et méthodes originales.

 

          3.       Les Etats prennent les mesures adéquates pour assurer la participation des populations autochtones à la détermination des conditions d'utilisation publique et privée des droits énumérés aux paragraphes 1 et 2.

 

 

                                                       Article XXI

                                             Droit au développement

 

          1.       Les Etats reconnaissent le droit des populations autochtones à prendre des décisions démocratiques à propos des valeurs, objectifs, priorités et stratégies qui présideront à leur développement et l’orienteront, même lorsqu’ils diffèrent de ceux adoptés par les Etats ou d’autres segments de la société.  Les populations autochtones ont droit, sans aucune discrimination, à obtenir les moyens adéquats pour assurer leur propre développement, en fonction de leurs préférences et de leurs valeurs, et à contribuer selon leurs propres modalités, en tant que sociétés distinctes, au développement national et à la coopération internationale.

 

          2.       A moins que des circonstances exceptionnelles ne le justifient dans l'intérêt public, les Etats prennent les mesures nécessaires pour que les décisions concernant un plan, un programme ou un projet quelconque touchant les droits ou conditions de vie des populations autochtones ne soient pas prises sans le consentement et la participation libre et informée desdites populations,  qu'il soit tenu compte de leurs préférences en la matière, et pour que ces décisions ne comportent aucune disposition qui pourrait avoir des effets négatifs sur lesdites populations.

 

          3.       Les populations autochtones ont droit à une restitution et à une  indemnisation qui ne soit pas inférieure aux normes du droit international, pour tout préjudice que l’exécution desdits plans ou propositions pourrait leur avoir causé, malgré les garanties antérieures; elles ont droit également à ce qu’on adopte des mesures d'atténuation des répercussions adverses écologiques, économiques, sociales, culturelles ou spirituelles qui pourraient résulter de cette exécution. 

 

 

                            SIXIEME SECTION.   DISPOSITIONS GENERALES

 

                                                      Article XXII

                           Dispositions, traités, actes, et accords constructifs

 

          Les populations autochtones ont droit à la reconnaissance, à l’observation et à l’application des dispositions, traités et accords conclus avec les Etats ou leurs successeurs ou résultant de faits historiques, conformément à leur esprit et à leur intention; elles ont droit également à ce que les Etats honorent et respectent lesdits traités, actes, dispositions et accords constructifs, ainsi que les droits historiques qui en émanent.  Les conflits et différends qui ne peuvent être résolus autrement sont soumis à des organes compétents.

 

 

                                                      Article XXIII

 

          Aucun élément du présent instrument ne peut être considéré comme excluant ou limitant les droits actuels et futurs que les populations autochtones pourraient avoir ou obtenir.

 

 

                                                      Article XXIV

 

          Les droits reconnus dans cette Déclaration constituent les normes minimales pour la survie, la dignité et le bien-être des populations autochtones des Amériques.

 

 

                                                      Article XXV

 

          Aucun élément de cette Déclaration ne peut être interprété comme donnant le droit d'ignorer les frontières des Etats.

 

 

                                                      Article XXVI

 

          Aucun élément de la présente Déclaration n'implique, ou ne peut être interprété comme permettant, une quelconque activité contraire à la mission et aux principes de l'Organisation des Etats Américains, y compris l'égalité souveraine, l'intégrité territoriale et l'indépendance politique des Etats.

 

                                                     Article XXVII

                                                    Mise en oeuvre

 

          L'Organisation des Etats Américains et ses organes, organismes et entités, notamment l'Institut interaméricain des affaires indigènes et la Commission interaméricaine des droits de l'homme, doivent promouvoir le respect et l'application intégrale des dispositions de cette Déclaration.

 

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