RAPPORT No 25/96

AFFAIRE 11.411

De la recevabilité

MEXIQUE

29 avril 1996

 

 

         Dans ce rapport, la Commission considérera la recevabilité de la présente affaire, au vu de fait que le Gouvernement a exprimé en des occasions réitérées que l’affaire devait être déclarée irrecevable, parce que les requérants n’avaient pas épuisé les recours prévus par le droit interne mexicain.

 

 

I.       ANTECEDENTS

         1.      Conformément à l’information fournie par les plaignants à la Commission interaméricaine des droits de l’homme (“la Commission”, dans ce qui suit), le 7 janvier 1994, des agents de l’armée mexicaine effectuèrent une violente intrusion dans la communauté autochtone de Morelia, Commune de Altamirano, Chiapas. Ils firent éruption dans les maisons, sortirent les hommes par des coups et des coups de crosses, les réunirent dans l’église et sur le terrain de basket-ball de la commune et, en ce lieu, les obligèrent à s’allonger contre le sol avec le visage contre le ciment. Pendant qu’ils les maintenaient dans ces positions, les soldats s’occupèrent à saccager les maisons et les magasins du village et à détruire les dispensaires. Trois des habitants, Severiano, Hermelindo et Sebastián Santiz Gómez, furent isolés du groupe, conformément à une liste que tenait un capitaine de l’armée et furent transférés à la sacristie de l’église où il furent torturés et ultérieurement embarqués à bord d’un véhicule militaire. Le 11 février 1994, les cadavres les trois autochtones furent découverts sur le chemin qui relie Altamirano et Morelia.

 

 

II.      PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

         2.      Le 23 novembre 1994, la Commission reçut une requête, dans laquelle était dénoncée la responsabilité de l’Etat mexicain, pour violation présumée des articles 4, 5, 7, 8, 25 et 1.1 de la Convention américaine sur les droits de l’homme (la “Convention américaine”, dans ce qui suit).

 

         3.      La Commission transmit au Gouvernement mexicain les passages pertinents de la requête, le 12 décembre 1994, et lui demanda des informations sur les faits dénoncés et sur quelque autre élément de jugement qui permettrait d’apprécier, si dans l’affaire, les voies de recours internes avaient été épuisés. Il impartit un délai de 90 jours pour ce faire.

 

         4.      Le 1er février 1995, la Commission reçut des informations supplémentaires des requérants et les transmit au Gouvernement mexicain, le 8 du même mois et de la même année.

 

         5.      Le 9 mars 1995, le Gouvernement demanda une prorogation de 30 jours, aux effets de réunir les documents pour donner une réponse adéquate; la Commission accéda à la demande le 13 mars 1995.

 

         6.      Le 10 avril 1995, le Gouvernement demanda une seconde prorogation de 30 jours, aux effets de réunir les documents pour donner une réponse adéquate; la Commission accéda à la demande le 17 du même mois et de la même année.

 

         7.      Le Gouvernement demanda, le 15 mai 1995, une troisième prorogation de 30 jours, aux effets de réunir les documents pour donner une réponse adéquate et la Commission accéda à la demande le 17 du même mois et de la même année.

 

         8.      Par une note reçue le 19 juin 1995, le Gouvernement présenta sa réponse sur l’affaire examinée.

 

         9.      Les requérants présentèrent leurs observations à la réponse du Gouvernement, le 13 septembre 1995, et le Gouvernement mexicain présenta ses observations finales le 22 novembre 1995.

 

         10.    Le 23 avril 1996, le Gouvernement présenta des informations supplémentaires, en rapport au droit de faire appel contre des décisions ou des omissions du Ministère public sur la base de l’article 21 de la Constitution fédérale.

 

 

III.     POSITION DES PARTIS PAR RAPPORT A LA RECEVABILITE

         A.     Position des requérants

 

         11.    Les requérants ont argué que, dans l’enquête sur les faits, il avait existé un total manque de volonté de la part des responsables et qu’il ne s’est produit aucune avancée importante depuis que les faits sont intervenus; qu’à partir de la découverte des corps, le Bureau du Procureur générale de l’Etat de Chiapas a initié une enquête préalable No. AL/014/994, qui reste ouverte sans que l’enquête n’est produit aucune avancée; qu’au mois de septembre 1994, le Procureur Adjoint de l’Etat déclara qu’il ne pouvait continuer l’enquête, du fait qu’il n’était pas possible de pénétrer dans la zone où s’étaient déroulés les faits, puisque l’armée ne le permettait, parce qu’il s’agissait d’une zone de conflit; que parallèlement à l’enquête préalable menée par le Procureur générale de l’Etat de Chiapas, il fut initié une enquête préalable No 332M/04/94 devant le Ministère publique Militaire, sans que non plus, l’intégration de celle-ci ne soit connue; qu’en conformité avec le critère affirmé pas la Cour Suprême de Justice de la Nation, il ne s’effectue aucun recours contre les actes ou l’inertie du Ministère publique, ce qui fait que les victimes manquent d’un recours effectif et raisonnable pour motiver la continuation des enquêtes.

 

         12.    Les requérants affirmèrent également que la position du Gouvernement a été de rejeter quelque type de responsabilité que ce soit sur les faits dénoncés; que le Secrétariat de Défense Nationale (SEDENA), en son communiqué No 30 du 14 février 1994 soutient par rapport à cette affaire que:

 

         les organisations politiques comme celles des droits de l’homme intéressées par l’affaire ont vu leurs demandes d’information satisfaites par les autorités militaires, qui furent suffisamment claires sur le fait que les trois individus jusqu’au moment de leur disparition, n’avaient jamais été détenus par le personnel militaire, vu que le 7 janvier il n’y avait pas de présence militaire de cette zone.

 

         13.    Dans leurs déclarations en date du 13 septembre 1995, les requérants répétèrent qu’il existait un retard dans l’enquête sur l’affaire ainsi qu’une série d’anomalies graves dans la procédure, mais aussi des déclarations des autorités qui contredisaient les faits, éléments qui convergent pour établir un manque de volonté de la part des autorités pour éclaircir les faits; que les recours à épuiser doivent être compris comme étant adéquats pour permettre de résoudre la situation dénoncée et non pas comme toute et chacune des instances prévues; que le recours adéquat était l’enquête préalable, qui dix-huit mois après l’intervention des faits dénoncés dans la présente affaire, n’a pas encore produit le moindre résultat concret.

 

         14.    Les requérants signalèrent ainsi que l’article 21 de la Constitution National Mexicaine, si elle établit bien la possibilité de contester des décisions du Ministère publique lorsque celle-ci s’abstient d’agir, le même Ministère publique se trouve en attente de réglementation, raison pour laquelle elle n’a aucune utilité pratique.

 

         15.    Les requérants affirmèrent également qu’une autre circonstance qui les exemptait de l’épuisement préalable des recours internes était la négligence et les contradictions de l’examen des dépouilles des trois hommes effectué par les autorités mexicaines; que le matin du 11 février 1994, un groupe de membres d’organisations non gouvernementales de droits de l’homme se rendit à Morelia, et découvrit des os et et des fragments de vêtements dispersés; qu’entre les restes de squelettes, il y avait des mâchoires partielles et complètes, l’une d’entre elles avec un travail dentaire distinct en argent que le fils de Sebastián, Humberto, identifia comme appartenant à son père; que la reconnaissance et l’examen des dépouilles ne furent pas effectués par personnel spécialisé, et qu’à la fin de leur travail, ils abandonnèrent dans la cours une côte humaine et des morceaux de cuir chevelu. De plus, ils placèrent les restes dans des sacs, les mélangeant indistinctement, sans aucune logique.

 

 

         B.      Position du Gouvernement

 

         16.    Le Gouvernement a signalé que non seulement des requérants n’ont pas rempli la condition d’épuisement des voies de recours internes, mais qu’il n’en ont même pas fait usage, puisque dans le cas où la procédure fut entachée d’irrégularités imputables à l’Agent du Ministère publique, que ce fût le serviteur public de l’ordre fédéral ou locale, les requérants auraient pu, selon le cas, s’adresser soit au Bureau du Contrôleur général de l’Etat de Chiapas, soit à la SEDENA, pour dénoncer l’agent du Ministère publique en question, et en leur cas pour déposer les requêtes correspondantes au Ministère publique Fédéral.

 

         17.    Il a également exprimé qu’il fut effectué, le 31 décembre 1994, une réforme de la Constitution Politique du Mexique; qu’entre autres réformes de la plus grande importance pour l’amélioration du fonctionnement de l’administration de justice, se trouvaient celles qui offraient la possibilité de contester par voie juridique, dans les termes établies par la loi, les décisions du Ministère publique sur le non exercice ou le désistement de l’action pénale; que jusqu’à cette date, l’article 21 était en attente d’un règlement d’application, mais qu’à défaut, la protection indirecte constituait un moyen de défense.

 

         18.    De même, le Gouvernement a indiqué que par rapport au retard de l’enquête sur l’affaire, aussi bien le Bureau du Procureur général de Chiapas que celui du Procureur général Militaire, non seulement ne retardèrent pas l’enquête en question mais que, lorsqu’il prirent la connaissance de la requête, ils initièrent et intégrèrent diligemment dans le cadre de leur compétences respectives, les enquêtes préalables pour élucider les faits; qu’en ce sens, le Bureau Procureur général Militaire mis en oeuvre les travaux d’intégration de l’achèvement des enquêtes en question.

 

         19.    Le Gouvernement a ajouté que par rapport aux experts qui effectuèrent les examens des corps, il s’agissait de personnes de grande capacité professionnelle, qui réalisèrent une expertise en pathologie, ontologie, médecine légale et criminalistique de terrain dans le cadre de leurs fonctions d’expert près le Bureau du Procureur général Militaire, pour établir leurs rapports dans l’investigation préalable No 33Z.M./04/94-E.

 

         20.    Dans ses observations finales du 22 novembre 1995, le Gouvernement confirma sa déclaration initiale sur le fait que les voies de recours internes n’avaient pas été épuisées et qu’il n’apparaissait aucune exception à l’épuisement de ces recours. Il signala que pour ne pas avoir invoqué la première exception de l’épuisement préalable établie par l’article 37.2 du Règlement de la CIDH, les requérants reconnaissent qu’il existe bien, dans la législation nationale du Mexique les recours et les procédures juridiques pour la protection des droits qu’ils estiment violés; qu’il est évident, qu’en l’existence des recours et les procédures juridiques, les requérants pouvaient y recourir et que s’il ne l’ont pas fait, soit par négligence, soit par ignorance, l’accès à ces recours ne leur a jamais été interdit.

 

         21.    Le Gouvernement affirma également que l’exception signalée dans l’article 37.2.c du Règlement, n’était pas non plus opérante, puisque dans l’enquête sur les faits effectuée par le Ministère publique, il n’existait aucun retard injustifié qui fût imputable à cette institution, et que déjà le rythme des démarches a correspondu à la nécessité d’une enquête complète et méticuleuse, du fait précisément de la gravité de la situation; que les uniques retards furent causés par des individus qui, étant cités à comparaître à temps et en bonne et due forme, ne se présentèrent pas devant la dite institution pour apporter les données et les éléments de connaissance qu’ils pouvaient avoir en leur possession, pour contribuer à l’élucidation voulue des faits avec la plus grand efficacité et promptitude; que le Ministère publique Militaire a rempli sa fonction d’enquête d’office, mais que malheureusement cette institution n’a pas pu compter sur la coopération requise pour l’élucidation des faits.

 

         22.    Le Gouvernement argua également que comme les requérants le signalaient, le Ministère publique était l’instance la mieux placée pour connaître les violations des droits de l’homme; néanmoins, ceux-ci ne se présentèrent pas auprès de cette institution pour y présenter une requête formelle ou une contestation, pour que pût s’exercer l’action pénale correspondante; qu’au vu du fait qu’aucune accusation formelle n’a été présentée, les autorités militaires assumèrent les enquêtes comme un devoir propre, à partir des déclarations recueillies dans la conférence de presse de M. Martín Faz Mora; qu’après les déclarations effectuées par M. Faz Mora devant les autorités compétentes, celui-ci reconnaissait qu’il ne connaissait les faits que par les dires supposés des voisins de l’endroit, circonstances qui n’enlèvent rien à la valeur de preuve de sa déclaration.

 

         23.    Le Gouvernement indiqua également, qu’après avoir effectué les démarches et obtenu les documents nécessaires, l’Agent du Ministère publique Militaire qui connaissait de l’affaire, puisque la probabilité de la responsabilité d’aucun élément militaire n’apparaissait pas, demanda le classement de ces documents dans les réserves légales, situation que les auxiliaires du Procureur générale Militaire ne trouvèrent pas appropriée, raison pour laquelle ils décidèrent de remettre l’affaire à la section des enquêtes préliminaires du dit Bureau du Procureur, sous le No SC/60/94/V,        pour qu’elle soit poursuivie, achevée, et déterminée sur les mêmes points; l’enquête resta inactive du 15 avril 1994 jusqu’au 26 mai 1995, date à laquelle la Commission Internationale des droits de l’homme apporta de nouveaux éléments; qu’à la date du 9 novembre 1995, puisqu’il n’apparaissait pas d’éléments de preuve qui démontreraient l’existence d’éléments d’aucun type militaire illicite, ni la probabilité de la responsabilité de personnel militaire, pour aucun délit commis, l’Agent du Ministère publique du tribunal militaire détermina que les faits à l’origine de l’enquête mentionnée n’étaient pas constitutifs de délit, et décréta en conséquence le classement avec les réserves légale.

 

 

IV.     CONSIDERATIONS GENERALES

         C.     Considérations relatives à la compétence de la Commission

 

         24.    La Commission est compétente pour connaître de cette affaire, puisqu’il s’agit d’allégations portant sur des droits reconnus par la Convention américaine; article 1.1, relative à l’obligation de respecter les droits; article 4, droit à la vie; article 5, droit à l’intégrité de la personne; article 7, droit à la liberté de la personne; article 8, droit aux garanties judiciaires; et l’article 25, droit à la protection judiciaire, comme le dispose l’article 44 de la Convention citée, dont le Mexique fait partie depuis le 3 avril 1982.

 

 

         D.     Considérations relatives aux conditions formelles de recevabilité

 

         25.    La présente requête réunit les conditions formelles de recevabilité prévues dans l’article 46.1 de la Convention américaine et dans les articles 32, 37, 38, et 39 du Règlement de la Commission. En effet, la requête contient les données apportées par les requérants, une description des faits qui sont présumé violer les droits de l’homme protégés par la Convention américaine, ainsi que l’identification de l’Etat considéré comme responsable de la présumée violation. De même, la requête fut présentée dans les délais impartis pour son dépôt, elle ne se trouve en suspens dans le cadre d’aucune autre procédure de règlement international, et n’est pas la reproduction d’une requête examinée par la Commission.

 

         26.    Relativement à la condition d’épuisement préalable des voies de recours internes, conformément à l’article 46.1.(a) de la Convention américaine, pour qu’une requête où une communication présentée à la Commission soit considérée recevable conformément aux articles 44 et 45, il faut “que les voies de recours internes aient été dûment utilisées et épuisées, conformément aux principes du Droit International généralement reconnus”.

 

         27.    Le paragraphe 2 du même article établit que les dispositions sur l’épuisement des voies de recours internes ne s’appliqueront pas quand:

 

         a.      il n’existe pas, dans la législation interne de l’Etat en question, une procédure judiciaire pour la protection du droit ou des droits dont la violation est alléguée;

         b.      l’individu qui est présumé lésé dans les droits s’est vu refuser l’accès des voies de recours internes ou a été mis dans l’impossibilité de les épuiser, ou

 

         c.      il y a un retard injustifié dans la décision dans les instances saisies.

 

         28.    Les requérants ont déclaré que le Bureau du Procureur général de l’Etat de Chiapas initia l’enquête préalable No AL/014/994, laquelle est toujours ouverte; de même, que le Ministère publique Militaire initia une enquête préalable No 332M/04/94; qu’il s’est écoulé 18 mois depuis que sont intervenus les faits et qu’il n’a pas été procédé aux enquêtes nécessaires sur l’affaire.

 

         29.    A cet égard, le Gouvernement mexicain signala que le retard dans les enquêtes a été du à la nécessité d’une enquête complète et méticuleuse. De même, il déclara que les seuls retards qui sont intervenus furent causés par les individus qui, étant cité à comparaître à temps et en bonne et due forme, ne se présentèrent pas devant la dite institution pour apporter les données et les éléments de connaissance qu’ils pouvaient avoir en leur possession, pour contribuer à l’élucidation nécessaire des faits avec la plus grande efficacité et promptitude.

 

         30.    Le droit à un procès “dans un délai raisonnable” que prévoit la Convention américaine se fonde, entre autres raisons, sur la nécessité d’éviter les retard indus qui se traduisent par une privation et un déni de justice, au préjudice des personnes qui invoquent la violation des droits protégés par la Convention mentionnée.[1]/

 

         31.    De même, la Cour interaméricaine a indiqué que “en aucune façon la règle de l’épuisement préalable ne doit conduire à un retard qui rend inutile l’intervention internationale”,[2]/ puisque le simple fait que les recours internes soient en cours ne signifie pas que la Commission n’ait pas la faculté d’analyser l’affaire, parce que ceci permettrait à l’Etat de conduire les enquêtes et les procédures judiciaires internes en les prolongeant d’une manière déraisonnable sans que puisse intervenir le système Interaméricain.

 

         32.    Il résulte des arrêts que plus de deux années se sont écoulées depuis l’intervention des faits, sans que jusqu’à cette date ne soit exercée l’action pénale nécessaire, ni qu’il y ait une indication fondée qu’elle va s’exercer, puisque les enquêtes connaissent un retard notable, ce qui fait supposer qu’elles ne produiraient aucun résultat positif. Ce fait est également confirmé par la déclaration faite à la Commission par le gouvernement qui signale que “le 9 novembre 1995, l’Agent du Ministère publique du tribunal militaire détermina que les faits qui déclenchèrent l’enquête n’étaient pas constitutifs de délit, décrétant en conséquence son classement avec les réserves légales”.

 

         33.    Le Gouvernement mexicain a déclaré qu’il existait une série de recours que les requérants auraient pu présenter avant l’utilisation d’une instance internationale, telle que le Bureau du contrôleur général de l’Etat de Chiapas, la SEDENA, ou le Ministère publique Fédéral; que la réforme de la constitution de décembre 1994 établissait également en son article 21 la possibilité de contester les décisions du Ministère publique dans les cas où il s’abstiendrait d’agir; néanmoins, ils ajoutèrent qu’en dépit du fait que l’article se trouvât en attente de réglementation, il a fait l’objet de la part des tribunaux fédéraux de deux interprétations: la première signale que la contestation des décisions du Ministère public “serait normée par toute loi secondaire de future création”; ou, “que cette loi existe déjà et que c’est précisément la Loi de protection, qui établit les moyens de contestation nécessaires.”

 

         34.    La Cour interaméricaine a signalé que “l’article 46.1 de la Convention renvoit aux principes du droit international généralement reconnus. Ces principes ne se réfèrent pas seulement à l’existence formelle de tels recours, mais aussi à la nécessité que ceux-ci soient adéquats et efficaces, comme il résulte des exceptions visées dans l’article 46.2”.[3]/

 

         35.    Qu’ils soient adéquats signifie que la fonction de ces recours, dans le cadre du système du droit interne, soit indiqué pour protéger la situation juridique enfreinte.[4]/

 

         36.    Qu’ils soient efficace signifie capables de produire un résultat dans les cas pour lesquels ils ont été conçus.[5]/

 

         37.    En appliquant ces principes à l’affaire, la Commission observe que “dans tout système juridique interne, il existe de multilples recours, mais tous ne sont pas applicables en toute les circonstances . . .”.[6]/ Dans le cas présent, la Commission estime que s’il existe bien les recours internes au Mexique, qui n’ont pas été exercés, le Gouvernement n’a pas démontré que ces recours étaient adéquats, ni efficaces pour résoudre les cas de violations dénoncées, capables d’obtenir d’une manière rapide que se réalisent les enquêtes nécessaires sur les faits dénoncées dont nous traitons.

 

         38.    De même, l’exposé fait par le Gouvernement mexicain, visant à obtenir l’application de l’article 21 de la Constitution fédérale du Mexique, n’est pas approprié, en vertu du fait que le recours disponible doit présenter les caractéristiques de simplicité, de rapidité, et d’efficacité aux termes de l’article 25 de la Convention américaine, puisque malgré certains cas où il a interdit une interprétation qui permette l’exercice de la protection indirecte, cette interprétation n’a pas été accepté de façon pacifique et généralisée par les tribunaux mexicains, mais de plus, comme l’a signalé le Gouvernement mexicain, il existe une autre interprétation, totalement opposée à la première, selon laquelle le recours auquel se réfère l’article 21 de la Constitution, doit faire l’objet d’une réglementation légale.

 

         39.    La Commission sur la base des arguments exposés, conclut que les exceptions de l’épuisement de recours internes établies par les articles 46.2.b et c de la Convention américaine sont applicables à l’espèce, et pour cette raison, elle exemptent le requérant de satisfaire à cette condition de recevabilité.

 

 

LA COMMISSION INTERAMERICAINE DES DROITS DE L’HOMME,

 

CONVIENT:

 

         40.    De déclarer recevable la requête reçue dans l’affaire 11.411, conformément aux articles 46, 47, et 48 de la Convention américaine.

 

         41.    D’envoyer le présent rapport au Gouvernement du Mexique et aux requérants.

 

         42.    De convoquer les partis à une audience à tenir au sein de la Commission durant sa quatre-vingt-treizième période ordinaire de sessions.

 

         43.    De poursuivre la considération des questions de fond exposées dans la présente affaire.

 

         44.    De publier ce rapport dans le Rapport Annuel à l’Assemblée générale de l’OEA.



  [1].      Demande devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme, affaire 11.219 (Nicholas Chapman Blake), 3 août 1995, p.32.

  [2].      Cour I.D.H., Affaire Velásquez Rodríguez, exceptions préliminaires,  Décision du 26 juin 1987.  Série C No 1, paragraphe 93.

  [3].      Cour I.D.H., Affaire Velásquez Rodríguez, Décision du 29 juillet 1988, page 16, paragraphe 63.

  [4].      Cour I.D.H., Affaire Velásquez Rodríguez, Décision du 29 juillet 1988, page 16, paragraphe 64.

  [5].      Cour I.D.H., Affaire Velásquez Rodríguez, Décision du 29 juillet 1988, page 16, paragraphe 66.

  [6].      Cour  I.D.H., Affaire Velásquez Rodríguez, Décision du 29 juillet 1988, page 16, paragraphe 64.